mardi 21 octobre 2014

Le patron de Total trouve la mort dans l'accident de son Falcon-50



« Il ne s'agit pas d'un tragique concours de circonstances, mais d'une négligence criminelle des fonctionnaires » de l’aéroport de Vnoukovo. Rendues publiques mardi 21 octobre à la mi-journée, telles sont les premières conclusions des enquêteurs russes sur les causes de l’accident d’avion qui a coûté la vie à Christophe de Margerie, PDG du géant pétrolier français Total, ainsi qu’à trois membres de l’équipage, lundi soir. Le Falcon-50 qui le ramenait en France a percuté un engin de déneigement sur la piste de décollage.



Mis en place mardi matin, le comité d’enquête avait, dans un premier temps, pointé quatre hypothèses – « erreur de pilotage, erreur du contrôle aérien, faute du conducteur de l’engin, mauvaise visibilité » –. Avant de cibler Vladimir V., le conducteur de la déneigeuse, âgé d’une soixantaine d’années, sorti indemne de l’accident mais choqué, et aussitôt soumis à des tests : « il était ivre » a rapidement rapporté Vladimir Markine, le porte-parole du comité d’enquête.

Une thèse contredite par l’avocat du conducteur, Alexandre Karabanov. « Safamille assure qu’il ne boit jamais et qu’il était sobre. Il était toujours conscient de sa responsabilité au travail », a-t-il déclaré, cité par l’agence Ria-Novosti. Vladimir V. est, depuis, en état d’arrestation.

Quelques heures plus tard, ces mêmes enquêteurs mettaient en cause la direction de l’aéroport de Vnoukovo pour sa « négligence criminelle » et son incapacité àcoordonner dûment le travail de ses employésprécisant que certains membres de la direction qui pourraient tenter d'entraver l'enquête seraient prochainement « suspendus de leurs fonctions ».

PREMIÈRES NEIGES ET BROUILLARD



Il était 23 h 57 à Moscou, lundi, 21 h 57 à Paris, lorsque le Falcon-50 de M. de Margerie, qui voyageait seul, s’est élancé sur la piste de Vnoukovo-3, un terminal réservé au transport privé d’hommes d’affaires. C’est le plus ancien aéroport de Moscou ; il est situé à 28 kilomètres au sud-ouest de la capitale russe.

Quelques secondes plus tard, le jet, en pleine accélération, heurtait avec son train d’atterrissage l’engin de déneigement présent sur le côté de la piste avant de seretourner et de prendre feu, ne laissant aucune chance à ses occupants. Des images furtives diffusées sur une chaîne de télévision locale ont montré les secours debout sur la carcasse fumante de l’appareil. Des débris ont été projetés à 200 mètres.

Dans un communiqué publié dans la nuit, Vnoukovo confirmait l’accident, en précisant que la visibilité était, au moment du crash, de « 350 mètres ». La veille, les premières neiges étaient tombées sur Moscou, mais elles avaient déjà fondu, les températures s’étant radoucies. Le brouillard qui s’était développé, provoqué par ce radoucissement, avait contraint les trois aéroports internationaux de Moscou à modifier quelques plans de vol de lignes régulières. Aussitôt après l’accident, l’aéroport Vnoukovo a été fermé, avant de reprendre ses activités vers 1 h 35 du matin.

M. de Margerie était bien connu en Russie, où il se rendait souvent, y compris lors du dernier Forum économique international organisé à Saint-Pétersbourg en mai, en pleine période de tensions entre Moscou et l’Occident en raison du conflit ukrainien. Il était venu participer, lundi, au Conseil consultatif des investissements étrangers (Foreign Investment Advisory Council, FIAC), rendez-vous annuel de grands investisseurs internationaux présents en Russie et coprésidé par le premier ministre russe, Dimitri Medvedev.

A la mi-journée, lundi, le PDG de Total, aussi coprésident de la chambre de commerce et d’industrie franco-russe, avait été invité dans la datcha de M. Medvedev, selon une source française. Mardi matin, Alexei Koudrine, l’ancien ministre russe des finances, a été le premier à réagir sur son compte Twitter:« Christophe de Margerie a fait beaucoup pour amener des investissements en Russie. Sa mort est une grande tragédie. »

Peu après, le président de Russie, Vladimir Poutine, a rendu public le télégramme de condoléances envoyé à François Hollande, pour déplorer la « perte d’un grand ami de la Russie » et « d’un grand entrepreneur à l’origine de beaucoup de projets communs (…) dans le domaine énergétique ». Par l’intermédiaire de son porte-parole, Dimitri Peskov, il a aussi salué le « dévouement continu » de l’homme d’affaires français « non seulement dans les relations franco-russes, mais dans toutes les formes de coopération ». Puis Dimitri Medvedev a pris le relais: « C’est une grande perte. M. de Margerie était un ami et un partenaire de notre pays (...) Il va nous manquer ». Le groupe Total est notamment le partenaire de Novatek pour le gigantesque projet gazier de Iamal dans le Grand Nord russe.

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